L'asile au Sud : Afrique, Méditerranée...

La demande d’asile en Israël : vers la « nationalisation »
de la procédure de prise en charge 

Karen Akoka
MIGRINTER-CNRS

Si la convention de Genève a pour objet de définir la qualité de réfugié et contraindre les Etats à protéger les étrangers reconnus comme tels, elle ne fixe pas les règles procédurales permettant l’obtention de ce statut. Elle renvoie aux Etats le soin de les organiser En Israël, jusqu’en 2001, il n’existe ni de procédures ni d’institutions nationales relatives à la prise en charge des demandes d’asile et des réfugiés. En leur absence, c’est le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) qui organise la procédure d’asile et qui détermine de la qualité de réfugié des étrangers qui la demande. A partir de 2001, s’amorce un processus qu’on pourrait qualifier de « nationalisation » de la prise en charge de la demande d’asile, dans la mesure où les autorités israéliennes jouent un rôle de plus en plus grand autant en ce qui concerne la réglementation de la procédure qu’en ce qui concerne la détermination du statut de réfugié, faisant de l’asile un domaine d’intervention de l’Etat.

Notre objectif, dans le cadre de cette communication est principalement d’analyser la prise en charge, en Israël, des demandeurs d’asile et des réfugiés qui entrent dans le champ de compétence de la Convention de Genève. Les travaux sur ce sujet, inexistants hier, sont encore très marginaux aujourd’hui. Une marginalité qui s’explique principalement par le petit nombre d’individus qui demandent l’asile en Israël et par le fait que la prédominance de travaux sur le conflit israélo-palestinien contribue à occulter un certain nombre de questions plus internes à la société israélienne. A ce jour un seul document, un rapport d’évaluation, a été publié sur la demande d’asile en Israël, réalisé conjointement par l’ONG Physicians for Human Rights et la faculté de droit de Tel-Aviv, en 2003.

L’objet de cet article est de décrire l’évolution de la procédure d’asile en Israël depuis le milieu des années 1970, mais également d’étudier la procédure tel qu’elle est en place aujourd’hui, à travers une analyse du rôle et de la place des différents acteurs en présence : l’Etat, le HCR et les demandeurs d’asile. Dans un premier temps nous nous attacherons à analyser l’évolution du nombre de demandeurs d’asile en Israël que nous mettrons en lien avec celle du nombre de travailleurs migrants. Dans un second temps nous analyserons l’évolution de la procédure d’asile en Israël ces trente dernières années, en dégageant les facteurs ayant contribués à la dynamique de nationalisation qui aboutit, à partir de 2001, à une prise en charge mixte des demandes, associant l’Etat et le HCR dans un modèle de collaboration original. Enfin dans un troisième temps il s’agira d’analyser le système tel qu’il existe aujourd’hui et de comprendre ce qu’il peut nous enseigner sur les formes d’acceptation par l’Etat d’Israël des populations étrangères sur son territoire.

Ce travail se base sur des informations récoltées dans le cadre de notre expérience professionnelle entre 1999 et 2004 au HCR de Jérusalem enrichie par nos travaux de recherche consacrés à la demande d’asile et aux institutions en charge de les instruire en France.

1. Les demandeurs d’asile en Israël 

1.1. Qui sont ils ?

Ce qui caractérise la population des demandeurs d’asile en Israël, c’est tout d’abord qu’il s’agit d’une population non juive et non palestinienne.

Une population non juive dans la mesure où la loi du retour (1950) autorise l’entrée en Israël à tout juif et la loi dur la nationalité (1952) permet l’accès à la nationalité à tout immigrant juif. La demande d’un statut légal en Israël d’une personne d’origine juive, qu’elle soit persécuté dans son pays d’origine ou non, est ainsi traité par le ministère de l’Intérieur et ne relève donc ni du champ d’application de la convention de Genève ni de la compétence du HCR.

En ce qui concerne les palestiniens, c’est la convention de Genève et l’interprétation qu’en fait le HCR qui les exclue du statut de réfugié, notamment en Israël. En effet, dans son article 1.D la convention stipule que les personnes bénéficiant « d’une protection ou d’une assistance » de la part d’un autre organisme des Nations Unies que le HCR, sont exclues de ce statut. Or, il est un organisme des Nations Unies, l’UNRWA, qui procure en Syrie, en Jordanie, au Liban, en Cisjordanie et à Gaza, une assistance aux réfugiés palestiniens principalement dans les domaines de l’éducation et de la santé. L’UNRWA ne procure cependant pas de protection à ces réfugiés : elle ne peut par exemple empêcher qu’ils soient envoyés dans un pays où ils craindraient d’être persécuté. Ainsi c’est en n’établissant pas de distinction entre les fonctions de protection et d’assistance que la convention de Genève exclue les palestiniens qui résident dans la zone d’activité de l’UNRWA, Israël incluse.

La population des demandeurs d’asile en Israël, ni juive, ni palestinienne, est ainsi composée de 83 % d’Africains avec comme nationalités principales, l’Ethiopie, le Congo, la Côte d’Ivoire. Sept pourcent viennent du contient asiatique, principalement de Birmanie et de Turquie ; 5 % du Moyen Orient ; 4 % d’Amérique du Sud (principalement de Colombie) et 1 % d’Europe de l’est. Certains entrent illégalement en Israël par les frontières terrestres et en particulier par le désert du Sinaï avec des passeurs bédouins, mais la majorité arrive légalement par voie aérienne, généralement avec un visa de touriste ou par le biais d’un pèlerinage en terre sainte, puis restent après expiration de leur titre de séjour.

Il est intéressant de noter que les pays d’origine des demandeurs d’asile et des réfugiés sont totalement différents des pays d’origine des travailleurs migrants présents en Israël: alors que 83 % des demandeurs d’asile viennent d’Afrique, ce continent ne représente que 7 % de la population des travailleurs migrants. A l’inverse, alors que la moitié des travailleurs migrants viennent d’Asie (Philippine et Chine en tête) c’est le cas de seulement sept pourcent des demandeurs d’asile.

1.2. Evolution du nombre de demandeurs d’asile en Israël

Aucun chiffre relatif au nombre de demandeurs d’asile en Israël n’est disponible avant 1970. A partir de cette date les demandes d’asile sont comptabilisées par décennies, les chiffres ne devenant annuels qu’à partir de l’an 2000. Il est cependant possible de faire quelques constatations en ce qui concerne l’évolution du nombre de demandeur d’asile en Israël à partir des années 1970 : très faible jusqu’à la fin des années 80, il a connu une augmentation croissante au début des années 90, avec un pic spectaculaire en 2003 suivi d’un mouvement de baisse légère qui débute l’année qui suit et qui semble continuer aujourd’hui. Nous diviserons l’histoire de la présence des demandeurs d’asile sur le territoire israélien en trois grandes périodes pour décrire ces fluctuations en montrant les différents facteurs qui les ont influencées et leurs liens avec l’évolution de la présence des travailleurs migrants dans le pays.

1.2.1. Du début des années 70 à la fin des années 80 : un nombre marginal

Au cours de la décennie 70, une moyenne de huit demandes d’asile par an est enregistrée par le HCR en Israël soit, 95 demandes d’asiles sur dix ans. Ce chiffre passe à 20 en moyenne par an pour ce qui est des années 1980, soit 237 demandes dans la décennie 80. La première période identifiée et qui s’étend jusqu’au début des années 90 se caractérise donc par un nombre extrêmement marginal de demandeurs d’asile.

En ce qui concerne les travailleurs migrants, ils sont principalement constitués durant ces années de Philippins qui travaillent comme domestiques en Israël et leur nombre est également marginal, l’essentielle de la main d’œuvre étant alors constituée de palestiniens qui pour beaucoup font des allers-retours entre les territoires occupés et Israël pour y travailler. Ils sont 2500 à avoir un permis de travail légal en 1987, alors même que cette année correspond à un pic dans l’octroi de ces permis, du à la première Intifada et la restriction des entrées sur le territoire pour les palestiniens. Ce nombre marginal s’explique par le fait que depuis sa création et jusqu’au déclanchement de la seconde Intifada en 1987, alors que l’immigration juive est fortement encouragée par l’état, l’immigration non juive est très fortement restreinte. C’est précisément cet ethos migratoire, qui fait d’Israël un pays d’immigration pour les juifs uniquement, qu’on retrouve dans les chiffres de demandeurs d’asile et de travailleurs migrants que nous venons de produire pour cette période.

1.2.2. La période 90-2002 : une augmentation croissante

Cette seconde période se caractérise quant à elle par une augmentation croissante et de longue durée du nombre de demandeurs d’asile en Israël. Ainsi, alors que durant la décennie 1980 seules 237 demandes d’asile sont déposées (20 par an en moyenne), ce chiffre passe à 753 durant les années 90 soit, 75 par an en moyenne. En 2000, le HCR qui commence à comptabiliser les demandes d’asile sur une base annuelle, enregistre 165 demandes dans l’année, chiffre qui passe à 283 en 2002.

Le nombre de travailleurs migrant suit durant ces années une évolution parallèle. Alors qu’à la fin des années 80, comme nous l’avons cité, seuls 2500 travailleurs migrants résidaient légalement en Israël, il étaient 103,000 en 1996. A la même date le nombre de travailleurs migrants légaux et illégaux compris était estimé selon les sources à 100 000 ou 300 000 personnes.

Le boom économique qui suit les accords d’Oslo en 1993 mais aussi la décision du gouvernement israélien, qui date de la même année, de fermer la circulation entre Israël et les territoires occupés, sont les deux grands facteurs qui expliquent ces augmentations. En effet, du fait de la double pression induite d’un coté par le besoin en main d’œuvre, lié à l’économique florissante et de l’autre par le manque de travailleurs palestiniens, lié à la fermeture des territoires occupés; les employeurs israéliens se mettent plus activement encore à la recherche d’une nouvelle main d’œuvre qu’au lendemain de la première Intifada et se tournent principalement vers Europe de l’est, l’Asie et l’Amérique latine. Parallèlement, grâce au calme relatif des années Oslo de plus en plus d’Africains chrétiens viennent en pèlerinage en Israël où ils découvrent un marché économique florissant et la possibilité de travailler.

1.2.3. A partir de 2003 : une augmentation spectaculaire suivie d’une baisse légère

Cette période est marquée par une augmentation à la fois spectaculaire et de courte durée des demandes d’asiles, suivie par un mouvement de baisse léger. C’est la nouvelle politique de restriction de l’immigration amorcée par le gouvernement israélien dès les années 2002, conséquence de la crise économique qui éclate à la fin des années 2000, qui marque le début de cette période. En Août 2002 une unité spéciale de police appelée «  police de l’immigration »  est ainsi créée par le gouvernement israélien qui lui donne comme objectif de combattre l’immigration clandestine, notamment  en expulsant 50,000 personnes par an. Puis, en octobre 2002, le premier ministre Ariel Sharon inaugure la politique dite de Closed Skies dont le but est de limiter l’entrée de nouveaux travailleurs étrangers par le replacement de travailleurs incarcérés pour présence illégale. En conséquence, le nombre de travailleurs, migrants baisse, pour atteindre, travailleurs légaux et illégaux compris le chiffre de 200000 personnes en 2003.

Cette nouvelle politique de restriction de l’immigration a un effet direct sur le nombre de demandes d’asiles qui augmente de façon spectaculaire en 2003, année qui suit la création de la nouvelle unité de police, pour atteindre le chiffre de 1390 demandes, c'est-à-dire quatre fois plus que l’année précédente. Dès 2004, ce chiffre commence à baisser légèrement passant à 922 demandes dans l’année, mais il reste encore largement supérieur aux chiffres d’avant 2002. Cette tendance semble se confirmer en 2005, année pour laquelle les chiffres disponibles ne concernent que les deux premiers mois (100 demandes d’asile pour ces deux mois), mais qui reportés sur un an ramène le nombre de demandes à  600, confirmant le mouvement de baisse légère.

L’augmentation de la demande d’asile en 2003, consécutive à une politique d’immigration restrictive, pour spectaculaire qu’elle soit, est peu étonnante. Plus surprenante est la baisse, même modérée, du nombre de ces demandes d’asile, un an à peine après cette augmentation spectaculaire. Plusieurs hypothèses sont susceptibles d’expliquer ce phénomène : La première est l’éventuel découragement que certains demandeurs d’asile aient pu éprouvés face aux échecs de leur compatriotes nombreux à avoir vu leur demande d’asile rejetée dès la première phase de la procédure. En effet, à la suite de l’augmentation spectaculaire des demandes d’asile et afin de dissuader les demandes abusives l’Etat d’Israël et le HCR ont rapidement mis en place une première sélection, appelée procédure courte, leur permettant de rejeter les demandes jugées manifestement infondées sans devoir remettre de documents autorisant un séjour le temps de l’instruction, à ceux qui les formulaient. La deuxième hypothèse est l’éventuel découragement que les demandeurs d’asile potentiels ont pu éprouver avant même d’être entré sur le territoire israélien. Une recherche plus poussée mériterait d’être dévolue à ce sujet, mais cette hypothèse si elle était vérifiée induirait que les demandeurs d’asile n’atteignent pas Israël au hasard de leur route vers l’Europe. La location géographique très spécifique de ce pays, entourée de frontières relativement fermées et surveillées, qui forment autant d’obstacles à l’entrée sur son territoire, constitue un élément supplémentaire tendant à souligner cette spécificité d’Israël dans les trajectoires migratoires du sud vers le nord. Ainsi, contrairement à beaucoup de pays d’Afrique et d’Asie qui sont souvent des étapes dans le trajet des demandeurs d’asile, comme des travailleurs migrants vers l’Europe, Israël constituerait une destination en soi, destination dont l’attrait semble s’être altéré ces trois dernières années du fait de la crise économique et de l’augmentation du nombre de contrôles de police et d’expulsions.

2. L’évolution de la procédure d’asile en Israël : de l’arbitraire souverain à la création d’un dispositif national

Si Israël est un des premiers pays à avoir signé (1951) et ratifiée (1954) la Convention de Genève en 1951, il n’a pourtant intégré aucune de ses dispositions dans sa législation. Plus encore, il a attendu les années 2001 pour mettre en place une procédure et une structure nationale relatives à la prise en charge des demandes d’asile et à l’octroi du statut de réfugié. Plusieurs raisons peuvent expliquer cet état de fait. Sur le versant pragmatique cette absence peut s’expliquer par le petit nombre de demandes d’asiles enregistrées jusqu’en 2000 qui n’aurait pas été de nature à pousser les autorités compétentes à mettre en place un système spécifique pour les traiter. Sur un plan plus idéologique, l’explication peut être liée à la peur des autorités qu’un tel système n’ouvre une brèche au retour des palestiniens à une large échelle et plus généralement, par leur réticence à se doter de dispositifs durables permettant l’accueil de personne d’origine non juive sur leur territoire. En ce sens, le fait qu’Israël ait signé la Convention de Genève sans l’incorporer dans ses lois jusqu’en 2001, témoigne de la tension spécifique qui la caractérise entre volonté de préserver le caractère juif de l’Etat d’un coté et celle d’être intégrée à part entière dans la communauté des pays occidentaux même s’il lui faut pour cela adopter certains principes de nature à remettre en question cette nature juive à laquelle elle est attachée. A travers cette position originale elle peut à la fois afficher sa volonté de suivre les principes universaux portés par les pays occidentaux à travers la convention de Genève, tout en limitant la portée de leur impact.

Cependant cette absence de système national qui prévaut jusqu’en 2001 n’empêche ni Israël de donner directement et souverainement l’asile à certains groupes de populations au cas par cas, pour des raisons humanitaires, sans passer par le droit international ; ni le HCR de s’occuper de la prise en charge des demandes d’asile sur la base de la convention de Genève. Nous nous proposons dans cette partie de décrire tour à tour ces deux types d’octroi d’un refuge en Israël qui ont cours jusqu’en 2001, puis les dynamiques à l’origine du nouveau dispositif national de prise en charge des demandeurs d’asile et des réfugiés qui est mis en place à partir de cette date

2.1. L’asile humanitaire : une décision arbitraire qui n’établit pas de précédents

Sur la base de leur nationalité certains groupes nationaux ont été accueillis par l’Etat d’Israël pour des raisons humanitaires, sans que celui-ci ne passe par le droit international ni par une procédure de détermination du statut de réfugié, mais sur la base d’une décision souveraine. C’est le cas par exemple en 1977 et en 1979 pour une centaine de « boat people » vietnamiens trouvés par des cargos israéliens en mer et à qui Begin, le premier ministre de l’époque offre un statut de résident permanent. C’est le cas en 1992 avec la décision du gouvernement Shamir d’accorder ce même statut à une centaine de bosniaques qu’il avait fait venir en Israël ; puis en 1999 en faveur d’une centaine d’albanais pour qui le gouvernement Natanyahou avait fait de même, mais à qui cette fois c’est un statut de résident temporaire qui avait été octroyé. C’est le cas enfin en mai 2000, lorsqu’un peu moins de 6000 membres de l’armée du Liban sud (ALS) sont admis en Israël, suite au redéploiement israélien du sud Liban.

L’octroi d’un refuge par Israël à des groupes de population spécifiques au cas par cas et sur une base humanitaire, lui permet de comptabiliser des bénéfices politiques secondaires, tout en évitant de passer par le droit ou de mettre en place un système et de créer ainsi des précédents. Ces bénéfices politiques secondaires sont principalement le renforcement du rattachement d’Israël au monde occidental et l’amélioration de son image en son sien. Ainsi, l’octroi d’un statut permanent aux boat people Vietnamiens n’est pas sans rappeler les pratiques des pays du bloc occidental, qui jusqu’à la fin de la guerre froide ont généralement accordé avec beaucoup de facilité, le statut de réfugié aux nationaux des pays communistes. L’accueil en temps de guerre, à l’instar des pays occidentaux, des bosniaques et des albanais de l’ex Yougoslavie, inscrit Israël dans la communauté des pays participant à l’effort de règlement du conflit yougoslave et à la gestion de la paix dans le monde. Enfin, comme l’ont montrés les travaux de Ben Herzog, l’image d’Israël altérée par sa collaboration avec l’ALS a pu être en partie requalifiée grâce à sa décision d’accueillir ces derniers avec leurs familles dans son pays. 

2.2. Les réfugiés reconnus par le HCR (1970-2002)

Ce sont des demandeurs d’asile reconnus réfugiés par le HCR, en conséquence de quoi Israël leur octroyait généralement, un titre de séjour. En effet, depuis le début des années soixante dix et jusqu’au début de l’année 2002, en l’absence d’institutions nationales compétentes, c’est le HCR qui reçoit les demandes d’asile en Israël, instruit les dossiers et décide à qui accorder le statut de réfugié.

Les demandes d’asile étaient d’abord déposées au bureau du HCR de Jérusalem, ses employés conduisaient alors des entretiens avec les demandeurs puis envoyait la retranscription de ces entretiens au siège du HCR à Genève sur la base desquels les employés du siège prenait la décision d’accorder ou non le statut de réfugié au intéressés. Si la décision était positive la directrice de la section du ministère de l’Intérieur en charge des étrangers était priée d’accorder à la personne concernée, un titre de séjour. Il semble qu’il n’existait pas de procédure interne dans ce bureau du ministère de l’Intérieur et selon plusieurs témoignages, la directrice de ce bureau avait le pouvoir de décider, seule, d’accorder ou non ce titre de séjour. Elle décidait alors au cas par cas, refusant quelque fois le titre de séjour même s’il semble qu’elle accordait dans la plupart des cas un titre après un temps variable, d’une durée et d’un type variable également. Nous n’avons pu répertorier qu’un seul réfugié ayant obtenu la nationalité israélienne après plusieurs années sur le territoire, s’il en existe d’autre leur nombre est extrêmement faible.

C’était donc un système compartimenté fait de pratiques hétérogènes dans lequel le HCR décidait qui était réfugié, et Israël accordait les droits associés à ce statut usant de son pouvoir discrétionnaire, qui était en place. Cet aspect artisanal était renforcé par le fait que le bureau du HCR de Jérusalem lui-même souffrait d’une absence de légitimité aussi bien aux yeux des autorités israéliennes que face au siège du HCR à Genève.

Le manque de légitimité du HCR-Jérusalem face au siège du HCR à Genève, se manifestait à travers le fait que le premier n’était pas autorisé par le deuxième à déterminer du statut de réfugié des demandeurs d’asile qu’il auditionnait. Il se manifestait également à travers le budget qui lui était accordé par le siège à Genève et qui atteignait en 1999 à peine, $3,000. Cette somme ne permettait ni le recrutement du personnel nécessaire, ni la location d’un bureau. Le HCR-Jérusalem était ainsi dirigé par une israélienne du nom de Zena Herman qui occupait déjà le poste de directrice de l’UNICEF-Israël qu’elle continua à diriger parallèlement au HCR et qui n’était assistée que d’un seul salarié a mi temps. La pièce qui servait de locaux, à la fois au HCR et à l’UNICEF, avait été prêtée à Mme Herman par le personnel d’une ONG israélienne, le JDC, semble t-il en guise de remerciement pour des services qui leur avait été rendus par son mari.

Le manque de légitimité du HCR-Jérusalem face à l’administration israélienne était non seulement perceptible à travers les pratiques discrétionnaires d’octroi de titres de séjour aux réfugiés reconnus par le HCR, mais également à travers le fait qu’aucun document officiel israélien n’était délivré aux demandeurs d’asile au cours de la procédure. Pour que ces derniers ne soient pas arrêtés à chaque contrôle de police, le bureau du HCR de Jérusalem leur remettait, le temps de l’instruction de leur demande, une feuille de papier de format A4 stipulant qu’ils étaient en attente d’une décision quant à leur statut. Ce document n’avait cependant aucune valeur légale et ne permettait à son détenteur ni de travailler ni du jouir d’une prise en charge médicale. Il était néanmoins et de façon informel respecté par les autorités de police qui ne procédait généralement pas à l’arrestation des demandeurs d’asile qui le détenait.

En plus d’illustrer le manque de légitimité du bureau du HCR face à ses interlocuteurs ces exemples montrent la nature informelle de ses infrastructures et de son travail, puis de façon plus générale, du système tout en entier. Jusqu’à la fin des années 2001, le dispositif en place est ainsi relativement artisanal caractérisé par un ensemble de pratiques hétérogènes et un  fonctionnement lourd et lent, dû en partie à la compartimentation des tâches entre différents acteurs peu coordonnés et en partie au manque de volonté israélien d’installer un système transparent, réglementé et standardisé de nature à réduire sa marge d’autonomie.

2.3. Vers la « nationalisation » de la procédure d’asile et de l’octroi du statut de réfugié

Alors que le bureau du HCR de Jérusalem n’était qu’un simple exécutant sans réelles responsabilités ni interlocuteurs, c’était le seul acteur du système qui se trouvait directement confronté aux demandeurs d’asile. Cette en grande partie cette exposition particulière qui semble expliquer les efforts entrepris au début des années 2000 par le bureau de Jérusalem du HCR pour pousser l’administration israélienne à mettre en place un système standardisé de prise en charge des demandes d’asile et des réfugiés. Cette démarche partait du postulat que la meilleur façon de régler les problèmes précédemment évoqués était d’impliquer Israël dans les différentes étapes de cette procédure et en particulier de faire que la décision d’octroyer le statut de réfugié soit une décision israélienne. Portée par le nouveau correspondant honoraire du bureau de Jérusalem, Mickey Bavly, le présupposé derrière cette démarche était qu’Israël serait plus encline à respecter une procédure dans laquelle elle était engagée et un statut qu’elle-même déterminait que ce qui pouvait lui être imposé par une entité extérieur. Le risque étant qu’en mettant la main sur la procédure d’asile et l’octroi du statut de réfugié Israël ne prenne des décisions contraire à la convention de Genève, le HCR comptait sur le fait qu’Israël ait signé cette convention comme garantie contre une telle éventualité. Cette volonté du HCR de transférer la responsabilité de l’octroi du statut de réfugié aux états et de les pousser à mettre en place des procédures nationales, n’est pas nouvelle. En effet le HCR négocie depuis plusieurs années avec nombre de gouvernements pour qu’ils établissent ces procédures et institutions et l’on trouve déjà dans les conclusions de son comité exécutif de 1977 de telles recommandations.

Ces efforts débouchèrent sur l’approbation, par le ministère de l’Intérieur, d’une directive interne, nommée directive sur la régulation du traitement des demandeurs d’asile en Israël. Cette dernière fixait à la fois une procédure nationale de prise en chargé des demandes d’asile et prévoyait la création d’un Comité interministériel, charge de la détermination du statut de réfugié. Composé de  représentants des ministères de la Justice, de l’Intérieur et des Affaires Etrangères, et présidé par un président indépendant qui n’est pas un fonctionnaire, ce comité est chargé de formuler des recommandations au ministre de l’intérieur quant à l’octroi du statut de réfugié. Avec l’adoption de cette directive, à la fin de l’an 2000, Israël s’est ainsi dotée pour la première d’un dispositif national relatif à la prise en charge des demandes d’asile sur son territoire composé d’une directive explicitant la procédure à suivre quant au traitement de ces demandes et d’une structure chargée de l’octroi du statut de réfugié.

Le nouveau correspondant honoraire au bureau de Jérusalem, un ambassadeur israélien à la retraite ayant également occupé le poste de directeur général adjoint au ministère des Affaires étrangères semble avoir joué un rôle prépondérant dans l’adoption de la directive par le ministère de l’Intérieur en un temps si court. Ce dernier jouissait en effet, du fait de sa longue carrière de diplomate, d’un certain prestige auprès de nombreux responsables politiques et de hauts fonctionnaires des ministères, qu’il connaissait pour beaucoup personnellement. Il pouvait ainsi contacter directement par téléphone les personnes compétentes et obtenir aisément des rendez vous avec eux pour les convaincre de l’aider à mettre en place le nouveau système. Ainsi c’est en partie et paradoxalement grâce à un fonctionnement basé sur les relations d’inter connaissance qu’un système de prise en charge des demandes d’asile plus standardisé et impersonnel a pu être mis en place.

3. L’asile gouverné par Israël 

3.1. Le nouveau dispositif national 

Le système mis en place et qui prévaut encore aujourd’hui, est le suivant.

Les demandeurs d’asile doivent déposer leur demande auprès du bureau du HCR à Jérusalem  qui conduit un premier entretien avec eux à l’issu duquel le HCR décide si leur demande doit être instruite en procédure courte ou en procédure longue. La procédure courte implique un entretien bref et une instruction rapide par le HCR, à l’issu duquel la demande est généralement considérée comme manifestement infondée. Le HCR présente alors au Comité chargé de la détermination du statut dans les deux mois, une recommandation courte, négative, quant à l’octroi du statut de réfugié. La procédure longue implique généralement la conduction par le HCR d’un ou plusieurs entretiens plus longs et d’une recherche approfondie, puis la présentation d’une recommandation élaborée, positive ou négative, par le HCR au Comité.

Si la demande d’asile est instruite dans le cadre de la procédure courte, le demandeur d’asile se voit délivré par le HCR un document confirmant qu’il a déposé une demande d’asile et précisant que pendant les deux mois prévus pour l’instruction de cette demande il devrait lui être permis de circuler librement. Ce document ne lui ouvre pas le droit de travailler. Si la demande est instruite dans le cadre de la procédure longue, le HCR délivre au demandeur un document d’une validité de six mois sur présentation duquel le ministère de l’intérieur est tenu de lui délivrer, ainsi qu’à son conjoint, un visa de touriste lui ouvrant le droit au séjour et au travail (visa B1). Il est renouvelable jusqu’à ce qu’une décision finale soit prise par le Comité quant à son statut.

Lorsqu’une personne est reconnue comme réfugié elle reçoit un visa de résident temporaire (visa A5) de deux ans renouvelable qui lui permet, ainsi qu’à son conjoint, de travailler et de bénéficier d’une prise en charge médicale. Tous les deux ans le Comité réexamine le dossier de la personne à qui elle a octroyée le statut de réfugié et peut décider de le retirer, par exemple, si la situation dans le pays d’origine de la personne a changée.

Lorsque la demande d’asile est rejetée, les personnes concernées reçoivent une lettre standard du ministère de l’Intérieur sans que soient précisées les raisons du refus. Les personnes ont alors la possibilité de contester cette décision de rejet et de demander un réexamen de leur demande. Cependant, un véritable mécanisme d’appel n’a pas encore été mis en place ni par la directive ni par le Comité ; l’appel contre la décision du Comité est ainsi nommée « reconsidération » et consiste simplement en un réexamen du dossier par les deux mêmes instances (HCR et Comité) que la lors de la demande initiale.

Enfin, au côté de ce dispositif d’accès au statut de réfugié, il faut ajouter un autre type de protection : la protection temporaire. Alors que le statut de réfugié est accordé aux personnes qui ont pu convaincre les autorités israéliennes qu’elles correspondaient à la définition du réfugié élaborée par la convention de Genève c'est-à-dire qu’elles craignaient personnellement d’être persécutées en cas de retour dans leur pays d’origine, la protection temporaire correspond à une protection contre les violences dues à des conflits généralisés. Elle est destinée, suite à une décision du ministère de l’Intérieur, aux nationaux du Sierra Leone (depuis 1999), du Congo, de la Côte d’Ivoire et du Liberia (depuis 2003). Tous les nationaux de ces quatre pays se trouvant en Israël, ont droit à cette protection renouvelable tous les six mois, même si elles ne craignent pas de persécutions individuelles en cas de retour. Cette protection sur critère unique de nationalité reste valide jusqu’à ce que les autorités israéliennes aient estimées que la situation s’y soit calmée de façon à garantir le  retour en toute sécurité de ces nationaux. C’est le HCR qui est chargé de conduire les entretiens avec chacun de ces nationaux dans le but de vérifier qu’ils sont bien les citoyens d’un de ces quatre pays. Si leur nationalité est confirmée le HCR leur délivre un document qu’ils peuvent présenter au ministère de l’Intérieur pour obtenir le même visa de touriste de six mois avec autorisation de travailler (visa B1) que celui dont dispose les demandeurs d’asile en procédure longue. Le nombre de personnes qui ont bénéficiées de cette protection en 2005 est estimé à environ 475 : 68 Sierra Léonais, 65 Libériens, 95 Congolais et 245 Ivoiriens. En 2006, la cessation de l’octroi de cette protection aux nationaux de Sierra Leone a commencé a être sérieusement envisagé par Israël qui l’aurait également limité aux résidents de certaines régions considérées comme risquées en Côte d’Ivoire et non plus à tous les nationaux de ce pays.

3.2. Les spécificités du système israélien

3.2.1. Coproduction du statut de réfugié

Le système de prise en charge de la demande d’asile tel qu’il est en place en Israël présente la spécificité d’une prise en charge mixte dans laquelle une institution nationale et une institution internationale co-produisent ensemble le statut de réfugié. Ce système dans lequel le HCR joue un rôle prépondérant pour ce qui est de la procédure et l’Etat un rôle prépondérant pour ce qui est de la décision, place cependant le HCR dans une situation relativement ambiguë. En effet, si son importance lui permet d’exercer une influence potentielle sur certaines décisions du Comité, sa participation même dans la procédure de détermination du statut et son intérêt à rester un interlocuteur crédible et de confiance aux yeux des autorités, peut dans le même temps nuire à sa capacité à agir au nom de la défense du droit des demandeurs d’asile et des réfugiés. La question qui se pose alors au HCR est de savoir s’il peut à la fois être partie prenante d’un système, tout en continuant à jouer son rôle traditionnel de surveillance de ce même système. 

Il est intéressant de constater que ce qu’on pourrait appeler la « nationalisation » de la procédure d’asile, c'est-à-dire la mise en place d’une procédure nationale de traitement des demandes d’asile en Israël, a ouvert à l’octroi par les autorités israéliennes de nouveaux droits aux demandeurs, notamment le droit à la protection temporaire pour les nationaux des quatre pays déjà cités et le droit de travailler. Ces droits, dont les demandeurs d’asile de peu de pays occidentaux bénéficient, ont pu être obtenus dans une certaine mesure grâce à l’intervention et surtout aux relations de Micky Bavly, le correspondant honoraire du HCR à Jérusalem, mais plus encore semble t-il, parce que l’Etat était désormais devenu maître de la procédure. Ainsi il semble que c’est précisément parce qu’il a acquis une souveraineté nouvelle sur l’octroi du statut de réfugié et sur la procédure de détermination de ce statut, qu’Israël s’est montré prêt à accorder de nouveaux droits aux requérants sous son autorité.

3.2.2. Les titres de séjours délivrés aux demandeurs d’asile et aux réfugiés comme  miroirs de l’acceptation par Israël de leur présence

Le fait que les autorités israéliennes délivrent désormais, de façon systématique et standardisée, des documents administratifs officiels aux demandeurs d’asile et aux réfugiés sur son territoire, semble indiquer la reconnaissance par ces autorités de ces deux populations en tant que telles. Cependant, l’analyse détaillée du type de documents qui leur sont délivrés participe à nuancer cette observation.

En effet, le visa de type B1, auquel ont droit les demandeurs d’asile dont le dossier est instruit dans le cadre la procédure longue, est le même que celui qui est délivré par le ministère de l’Intérieur aux travailleurs migrants. C’est un visa de touriste assorti d’une permission de travailler. Ainsi il n’existe pas de titre de séjour spécifique au demandeurs d’asile en Israël. En ce qui concerne les réfugiés statutaires le situation est identique : dans la mesure où il n’existe aucun type de certificat de réfugié, les personnes reconnues en tant que tel à l’issu de la procédure d’asile, reçoivent des visas de type A5, c'est-à-dire un titre de résident temporaire. A travers l’octroi de ce type de visa, le message symbolique délivré par les autorités israéliennes aux réfugiés et aux demandeurs d’asile, est, pour les premiers, qu’ils sont censés ne rester que temporairement dans leur pays d’accueil et pour les deuxièmes qu’ils sont considérés non pas comme des individus en quête de protection mais des visiteurs ou des travailleurs migrants.

Mais l’absence de document administratif peut également être interprétée par le fait que le système est nouveau. Son institutionnalisation étant encore en cours l’administration n’aurait alors pas eu encore le temps de produire les titres adéquats.

Beaucoup moins ambiguë est le fait que le titre de résident temporaire, accordé aux personnes ayant obtenues le statut de réfugié, n’ait qu’une validité de deux ans renouvelables. Alors qu’un réfugié est généralement considéré comme une personne nécessitant un nouvel endroit afin de reconstruire sa vie, ce permis qui en fait du réfugié un invité temporaire est plus clairement le signe de la réticence d’Israël quant à l’installation de personnes non juives sur son territoire. Plus encore, depuis sa création en 2001, le Comité s’est montré extrêmement scrupuleux quant au réexamen des dossiers des réfugiés statutaires dont le visa était arrivé à expiration pour vérifier si leur crainte de persécution était encore actuelle où s’ils pouvaient désormais rentrer dans leur pays d’origine. Ces dossiers sont généralement traités en priorité, au détriment de demandes d’asile n’ayant pas encore été examinées, malgré le stock de dossiers en attente d’être instruits.Ajoutés à l’absence de possibilité pour un réfugié statutaire d’accéder à la citoyenneté israélienne quelque soit la longueur de son séjour dans le pays, tous ces éléments indiquent qu’Israël s’envisage uniquement comme un refuge temporaire pour des personnes dont la vocation serait de rentrer dans leur pays dès que la situation le leur permettrait. Ils révèlent la difficulté pour un état se définissant comme juif et démocratique, de s’affranchir de la surveillance démographique constante qu’un tel régime suppose et d’accepter qu’une population non juive, quelle qu’elle soit, s’installe durablement sur son territoire.

Cette difficulté à accepter l’installation durable de personnes non juives, se perçoit également à travers l’étude de l’interaction au guichet entre les petits fonctionnaires du ministère de l’Intérieur affecté au service des étranger et les demandeurs d’asile et réfugiés qui s’y rendent. Plusieurs témoignages de demandeurs d’asile et de citoyens israéliens les accompagnant ont pu être réunis, montrant l’accueil agressif et les commentaires racistes de ces agents administratifs envers la population dont ils étaient chargés de traiter quotidiennement la demande. Ces commentaires portaient principalement sur la couleur de peau des demandeurs, et sur le fait qu’ils devraient rentrer dans leur pays, n’ayant rien à faire en Israël.

Il est important de noter que le ministère de l’Intérieur était gouverné pendant de longues années (entre 1996 et 2003 avec une pause de deux ans entre 1999 et 2001) par le parti Shass, un parti ultra orthodoxe, ayant contribué à développer une atmosphère d’antagonisme ethnique dans cette administration.


L’institutionnalisation commencée avec l’adoption de la directive interne du ministère de l’Intérieur en 2001 marque une tournant avec la prise de décision artisanale, hétérogène et au cas par cas qui caractérisait la période précédente. Avant qu’un tel système ne soit mis en place Israël pouvait utiliser, beaucoup plus aisément, son pouvoir discrétionnaire contre les demandeurs d’asile ou les réfugiés ou au contraire utiliser son droit souverain pour donner l’asile sans créer de précédents. En privilégiant l’arbitraire et la prise de décision au cas par cas et en évitant d’inscrire la prise en charge de la demande d’asile à l’intérieur d’un véritable système national, Israël pouvait contrôler plus le nombre de non juif s’établissant sur son territoire. Le paradoxe étant que le transfert d’une grande partie de la pris en charge de la procédure d’asile aux autorité israélienne limite sa marge de manœuvre, l’obligeant à plus de transparence et a moins de pratiques discrétionnaire.

Autre impact de l’institutionnalisation du droit d’asile, l’institutionnalisation du rôle du bureau du HCR de Jérusalem et l’octroi de nouveaux droits aux demandeurs d’asile. Mais si les nouveaux droits accordés au demandeurs d’asile sont étendus (dans la mesure où peu de pays en Europe ne les accordent), ils restent des droits temporaires. Ils ne sont pas de nature à défier l’ethos d’Israël en matière d’immigration qui consiste à la limiter aux personnes d’origine juive. L’analyse de la procédure et des titres de séjour délivrés aux demandeurs d’asile et au réfugiés a ainsi mis en évidence la logique des autorités israélienne en matière d’asile, une logique basé sur l’acceptation du séjour temporaire et le refus du séjour permanent. C’est sans doute précisément par ce qu’ils restent dans le champ de sa logique temporaire qu’Israël a accepter d’octroyer ces droits alors que rien ne l’obligeait à le faire.

La question principale qui reste quand à l’évolution du processus d’institutionnalisation, qui n’est pas fini est la suivante : verrons nous dans les prochaines années une législation nationale sur les réfugié apparaître et quelle impact aura-t-elle sur l’ethos d’Israël en matière d’immigration.

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