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Quelle prise en charge institutionnelle des personnes âgées au Liban ?

Charbel EL BCHERAOUI, UMR 6578 « Unité d’anthropologie bioculturelle », CNRS, Université de la Méditerranée, Marseille, France et CDC, Atlanta, USA
Nicole CHAPUIS-LUCCIANI, UMI 3189 « Environnement, Santé, Sociétés », CNRS, France ; Université Cheikh Anta Diop, Dakar, Sénégal ; Université de Bamako, Mali ; CNRST, Burkina Faso.

Avant-propos

Cette communication prend appui sur la publication suivante : EL BCHERAOUI C., CHAPUIS-LUCCIANI N., 2008. La gestion institutionnelle de la vieillesse au Liban. Human and Health, No. 4, 44-49. Veuillez vous y reporter pour plus de détails.

Contexte de l’étude

Le vieillissement des populations de la région Moyen-Orient/Afrique du Nord s’accompagne d’une augmentation du taux de personnes âgées dépendantes nécessitant une prise en charge collective.

Selon les estimations de Courbage (2001) le Liban, pour sa part, compterait 50000 hommes et 64000 femmes âgés de 75 ans et plus en 2010 ; cette estimation semble d’ors et déjà dépassée selon l’Administration Centrale des Statistiques qui estime le nombre de personnes de cette même tranche d’âge à 135000 dès 2007.

Contrairement aux idées reçues, la prise en charge institutionnelle des personnes âgées n’est pas récente au Moyen-Orient puisque la première structure de soins pour personnes âgées, crée à Constantinople, date du 4ème siècle sous l’influence de préceptes chrétiens. Au Liban, la première institution date de 1874, la seconde de 1946. Depuis, ce mode d’hébergement s’est développé progressivement à raison de l’ouverture d’une institution en moyenne tous les deux ans jusqu’en 2005, date de notre enquête. Notre objectif a été d’identifier les institutions prenant en charge les personnes âgées et d’analyser leur mode de fonctionnement afin d’attirer l’attention des politiques dans une perspective d’amélioration des services fournis aux personnes âgées.

Méthodes

Nous avons répertorié les institutions s’occupant de personnes âgées enregistrées au Ministère des Affaires Sociales et du Ministère de la Santé du Liban en 2005. Nous avons établi un questionnaire portant sur le financement, les services fournis, la capacité et les ressources humaines des institutions. Ce questionnaire a été rempli au cours d’un entretien avec les directeurs des établissements.

Résultats

Institutions

L’enquête a porté sur l’ensemble des 34 institutions répertoriées. Elles sont réparties en 8 unités de soin de longue durée offrant 1 064 lits, 24 maisons de retraite offrant 1046 lits et un foyer-logement de 60 places.

On observe que la capacité globale en lits de ces institutions (3 670 lits) est supérieure aux besoins puisque nombre des lits occupés est de 2 106. Or, certaines institutions étaient en manque de résidents alors que d’autres ont des listes d’attente plus longues que la liste de ceux qui y résident. La disparité dans le taux d’occupation pourrait s’expliquer par la répartition géographique des institutions ; celles qui ont les taux d’occupation les plus élevés se trouvent en milieu urbain (les régions les plus proches de la capitale) où l’idée de loger dans une maison de retraite est plus acceptée que dans les milieux ruraux. La majorité des maisons était occupées exclusivement, ou en majorité, par des chrétiens ; seules 6 d’entre elles accueillaient en majorité des musulmans et une des druzes.

Soixante treize pour cent des personnes institutionnalisées étaient partiellement ou totalement dépendantes dont 22% atteintes de la maladie d’Alzheimer. Les résidents bénéficiaient d’un nombre correct de personnel paramédical. Toutes les institutions avaient recours à un médecin, généraliste, cardiologue, mais seules 5 institutions avaient recours à un médecin gériatre ; 10 d’entre-elles enfin employaient un psychiatre ou un psychologue. Les coûts des séjours étaient pris en charge partiellement par le Ministère de la Santé pour un tiers des résidents et le Ministère des Affaires Sociales participait aussi au financement d’une partie des séjours.

Aide à domicile

L’État n’offrait aucune aide à domicile pour les personnes dépendantes ; huit institutions proposaient une forme d’aide à domicile, mais une seule une aide médicale (médecins, infirmières, aides-soignantes, physiothérapeutes).

Conclusion

Depuis ces 5 dernières années, une dizaine de nouvelles maisons de retraite ont été ouvertes au Liban (Ministère des Affaires Sociales, 2010), ce qui montre bien l’implication des Libanais dans la prise en charge institutionnelle des personnes âgées. Cette augmentation exponentielle justifierait pleinement la réalisation d’une nouvelle enquête qui permettrait de mesurer finement l’évolution de cette prise en charge tant au niveau de leurs caractéristiques médico-sociales que géographiques et confessionnelles.

Référence

Courbage Y., 2001, New Demographic Scenarios in the Mediterranean region. Paris : INED. 87 p.

Charbel El Bcheraoui : Unité Mixte de Recherche 6578, « Unité d’anthropologie bioculturelle », CNRS, Université de la Méditerranée, Marseille, France. Actuellement : Epidemic Intelligence Service Officer, Minority AIDS/HIV Research Initiative & HIV Vaccine and Special Studies, Epi Branch, DHAP, NCHHSTP, CDC ; Atlanta, USA.

Nicole Chapuis-Lucciani : Unité Mixte Internationale 3189 « Environnement, Santé, Sociétés », CNRS, France – CNRST, Burkina-Faso - Université de Bamako, Mali – UCAD Dakar, Sénégal.

Correspondances

Charbel El Bcheraoui,
Division of HIV/AIDS Prevention,
1821 N. Rock Springs Rd., Atlanta, GA, 30324, USA
Email : charbelbcheraoui@yahoo.com

Nicole Chapuis-Lucciani
UMI 3189 "Environnement, santé, sociétés"
Faculté de Médecine, Université Cheikh Anta Diop, Dakar, Sénégal
Email : nicole_chapuis@hotmail.fr

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