Critique de la notion de retour, les ressources d'une approche qualitative


Résumé


Une approche critique de la notion de retour


Introduction


Le mot " retour " définit des situations migratoires qui concernent autant le retour des émigrés (ceux qui reviennent au pays qu'ils définissent comme tel et qui n'est pas forcément le pays où ils sont nés), que des mouvements décrits faute de mieux sous le terme d'immigration ethnique mais aussi ceux des réfugiés, déplacés après un conflit ou une catastrophe naturelle ou encore, le retour d'une diaspora. Il convient donc dans un premier temps de soumettre la notion de retour à un examen critique en montrant ce qu'elle dit sur la conception même de la migration (pour cela je m'appuierai sur l'expérience de la France). Dans un deuxième temps, je voudrais montrer que dès lors qu'on s'intéresse aux pratiques des migrants, il faut abandonner une " pensée d'État " (Sayad) ancrée dans un seul territoire et relativiser les catégories dichotomiques immigré/émigré, ici/là-bas et ne pas éliminer les pratiques de va-et-vient où les mobilités, sous prétexte qu'elles ne rentrent pas dans la catégorie " retour ", dont on voit déjà qu'elle implique quelque chose de définitif.


1. La dimension politique et symbolique du retour : l'exemple de la France


Lors de la fermeture des frontières à l'introduction de nouveaux travailleurs étrangers dans le cadre légal dans les années 74-75, la France comme la Belgique, l'Allemagne et les Pays-Bas ont espéré un retour des migrants vers leur pays d'origine. La leçon a tiré de cette période est que la grande majorité des migrants et de leurs enfants arrivés dans les années soixante et au début des années soixante-dix ne sont pas repartis.
Du point de vue des immigrés, avec la durée du séjour et la crise qui se prolongeaient, ces derniers avaient acquis une expérience migratoire faites notamment de pratiques de va-et-vient entre ici et là-bas : la voiture, le train, l'avion, la radio, la presse, les moyens de communication de masse ont petit à petit structuré un monde où les distances ne sont plus des obstacles. En même temps la connaissance des conjonctures économiques et politiques internationales n'est plus uniquement réservée aux spécialistes et les immigrés peuvent y avoir accès (par le biais des associations notamment) pour forger leurs propres anticipations et ajuster leurs projets aux différentes conjonctures économiques et politiques.


2. La mobilité signe-t-elle la fin du "retour "?


Dans les années 70 et malgré les pressions à faire partir les immigrés, ils ont choisi dans leur grande majorité de prolonger leur séjour dans le pays d'immigration tout en maintenant des formes de retour périodique et sans pour cela renoncer à l'idée de repartir un jour. Nombre d'entre eux effectuaient des allers-retours sans pour autant qu'ils s'agissent de " racines retrouvées " ou de " retour aux sources ", selon les clichés bien connus. Il s'agissait plutôt de formes d'appartenances et de loyauté combinées, ces va-et-vient témoignaient d'une " bilatéralité des références " selon l'expression de M. Catani.

Aujourd'hui les flux et les mouvements de population à l'échelle de la planète vont dans le sens d'une remise en question des identités " territorialisées " et s' il est difficile de pressentir les formes d'appartenance qui se déploieront dans l'avenir on peut penser qu'elles iront en se complexifiant. On observe déjà une hétérogénéité des formes de circulation et le développement de modes d'organisation en réseaux transnationaux. Dans cette logique, le terme " retour " et le phénomène qu'il décrivait reste encore prisonnier des références à l'histoire.


3. Une approche compréhensive


Mais comment saisir les processus migratoires contemporains qui se laissent difficilement modéliser à l'aide d'outils statistiques ? Mais surtout comment saisir ces processus qui relèvent d'une territorialité plurielle ? Enfin comment donner un sens sociologique à des attitudes et comportements qui varient d'une personne à une autre, d'un groupe à l'autre
1) Le rapport " au pays ", le sien ou celui de ses parents ne peut s'analyser à travers l'alternative : retour au pays ou installation définitive dans le pays d'accueil, grille de lecture qui occulte la diversité des pratiques et des projets. Dès lors c'est la notion de projet qui doit retenir l'attention.
2) Enfin il semble que si l'on s'interroge sur le sens que donne les acteurs à leurs pratiques, alors c'est dans leurs propres catégories qu'il convient de donner un nouveau contenu à la notion de " retour ".


Bibliographie